Tribunal administratif de Pau, 30 décembre 2020, n° 1801459

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Pau, 30 déc. 2020, n° 1801459
Juridiction : Tribunal administratif de Pau
Numéro : 1801459

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF ps DE PAU

N° 1801459 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________

CENTRE HOSPITALIER DE DAX

___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


M. X

Rapporteur

___________ Le tribunal administratif de Pau

(1ère Chambre) M. Clen Rapporteur public

___________

Audience du 17 décembre 2020 Décision du 30 décembre 2020 ___________

[…]

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 27 juin 2018 et le 7 mars 2019, le centre hospitalier de Dax, représenté par la Selas Altra Consulting, demande au tribunal :

1°) d’ordonner la restitution du crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 460 138 euros, au titre du mois d’août 2017, que le directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques lui a refusé par une décision du 27 avril 2018 ;

2°) d’assortir les dégrèvements de taxe sur la valeur ajoutée, qui en résultent, des intérêts moratoires correspondants.

Il soutient que :

- à la suite de l’abandon de la clé de répartition économique qu’il appliquait depuis l’année 2011, sur autorisation des services fiscaux et par dérogation à l’article 271 du code général des impôts, pour établir ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée, il a déclaré en 2016 un montant de TVA déductible supplémentaire de 1 530 102 euros qui, partiellement consommé,



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a généré un crédit de TVA de 460 138 euros dont il est fondé à solliciter la restitution, au titre de la période d’août 2017 ;

- quand bien même il n’a pas, au 31 décembre de l’année concernée, renoncé à l’option antérieurement autorisée, l’application de la doctrine prévue au BOI-TVA-DED-20-10-10 § 30 ne peut prévaloir sur l’application des dispositions de l’article 271 du code général des impôts et de l’article 206 de l’annexe II à ce code, auxquelles elle contrevient et qui lui sont plus favorables ; l’option de la grande clé économique déroge en effet aux dispositions de droit commun, elle est contraire au principe de neutralité de la TVA, et elle ne peut être opposée au contribuable qui entend se prévaloir de dispositions légales plus favorables ;

- les motifs de substitution invoqués par l’administration fiscale doivent être écartés, dès lors que :

- la méthode de calcul appliquée par le centre hospitalier est conforme au II de l’article

206 de l’annexe II au code général des impôts ; elle s’appuie sur les pôles et unités fonctionnelles de sa comptabilité analytique, sans conduire à une sectorisation de fait de ses activités ; le calcul pour les achats stockés est conforme au 2° du IV de l’article 207 de la même annexe ;

- il a appliqué aux dépenses mixtes, non la clé de répartition économique, mais un coefficient de déduction forfaitaire qui est le produit du coefficient d’assujettissement, du coefficient de taxation et du coefficient d’admission prévus à l’article 206 de l’annexe précitée ; le critère financier retenu, à supposer même qu’il ne soit pas pertinent, n’interdit pas d’utiliser un coefficient d’assujettissement basé sur les recettes, et ne peut conduire à écarter l’ensemble de la méthode appliquée pour ce seul motif.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 décembre 2018, le directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il sollicite la validation de la décision de rejet du 27 avril 2018, par voie de substitution de motifs ;

- en application de l’article 209 de l’annexe II au code général des impôts, les opérations situées hors du champ d’application de la TVA et les opérations imposables doivent être comptabilisées dans des comptes distincts pour l’application du droit à déduction ;

- il en va de même des opérations situées dans le champ d’application de la TVA, pour les secteurs d’activité qui ne sont pas soumis à des règles identiques au regard de cette taxe ;

- en conséquence, les activités de restauration, de blanchisserie et de pharmacie, pour partie imposables et pour partie hors champ, qui ne relèvent pas de règles identiques, ou pour lesquels il n’existe pas des moyens spécifiques, ne peuvent être érigés en secteur distinct ;

- seul le coefficient de taxation est susceptible d’être affecté par la constitution de secteurs ;

- la solution revendiquée par le centre hospitalier de Dax consistant à appliquer un coefficient d’assujettissement unique par pôle d’activité ou unité fonctionnelle, doit être écartée ;

- s’agissant des dépenses mixtes utilisées concurremment pour la réalisation

d’opérations dans le champ et hors du champ d’application de la TVA, le coefficient

d’assujettissement doit être calculé pour chaque bien ou service selon tout critère physique, technique ou financier de nature à traduire au mieux leur proportion d’utilisation réelle pour la réalisation d’opérations imposables ; ce coefficient doit, en revanche, être nul pour les dépenses exclusivement utilisées pour les opérations hors champ de pharmacie, de restauration, de blanchisserie et d’hospitalisation et des soins, et être égal à l’unité pour les dépenses



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exclusivement utilisées pour les besoins des activités imposables de pharmacie, de restauration, et de blanchisserie ;

- le recours à la clé de répartition économique applicable à l’ensemble des dépenses de l’assujetti, sous réserve de la constitution de secteurs d’activités distincts, est exclusif de l’application de la règle de l’affectation prévue à l’article 206 de l’annexe II au même code ;

- en tout état de cause, le centre hospitalier de Dax ne justifie pas de la détermination des différents coefficients de déduction dont il entend faire application.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné M. Pascal Cabon, premier conseiller, pour présider la première chambre, en application de l’article R. 222-17 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. X,

- et les conclusions de M. Clen, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L’établissement public administratif du centre hospitalier de Dax exerce, pour l’essentiel, des activités se situant hors champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée, et pour partie, des activités imposables à cette taxe, au sein desquelles figurent des opérations taxables et des opérations exonérées. En sa qualité d’assujetti à la TVA, il bénéficie du droit de déduire la TVA qui lui est facturée pour les opérations imposables. A compter de l’année 2011, l’administration fiscale a autorisé le centre hospitalier, sur sa demande, à déterminer son droit à déduction pour l’ensemble de ses dépenses, mixtes ou non mixtes, en appliquant une clef de répartition unique dite « clé de répartition économique », calculée en fonction de la quote-part des recettes taxables par rapport aux recettes totales. Cette autorisation, valable pour l’année civile, a été tacitement renouvelée.

2. Le centre hospitalier de Dax a inscrit, sur une ligne distincte de sa déclarations CA3 du mois de novembre 2016, un montant supplémentaire de TVA déductible de 1 041 397 euros, portant sur la période 2014-2015 et résultant d’une modification de sa méthode de calcul de la détermination de ses droits à déduction, lequel a généré un crédit de TVA reportable sur les périodes postérieures. Ce crédit a été partiellement consommé. Le 26 septembre 2017, l’établissement public a présenté une demande de restitution d’un crédit de TVA d’un montant



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de 460 138 euros, au titre du mois d’août 2017. Il a été avisé le 7 février 2018 de l’engagement de la procédure d’instruction prévue à l’article L 198 A du livre des procédures fiscales.

A l’issue des opérations réalisées sur place entre le 14 avril et le 26 avril 2018, l’administration fiscale a rejeté la demande du centre hospitalier, par une décision du 27 avril 2018 qui lui a été notifiée le 30 avril 2018. Par la présente requête, le centre hospitalier de Dax qui, par ailleurs, a adressé le 8 avril 2020 une demande de rescrit fiscal à la direction de la législation fiscale de la direction générale des finances publiques, dont la prise de position éventuelle ne pourra valoir que pour l’avenir, demande au tribunal d’ordonner la restitution du crédit de taxe sur la valeur ajoutée litigieux, et d’assortir les dégrèvements qui en résulteraient des intérêts moratoires correspondants.

3. Aux termes du I de l’article 256 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : « Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. ». Aux termes de l’article 271 du même code : « I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d’une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / Toutefois, les personnes qui effectuent des opérations occasionnelles soumises à la taxe sur la valeur ajoutée n’exercent le droit à déduction qu’au moment de la livraison. / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l’article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; / b) Celle qui est due à l’importation ; / c) Celle qui est acquittée par les redevables eux-mêmes lors de l’achat ou de la livraison à soi-même des biens ou des services ; (…) / 2. La déduction ne peut pas être opérée si les redevables ne sont pas en possession soit desdites factures, soit de la déclaration d’importation sur laquelle ils sont désignés comme destinataires réels. (…) / III. A cet effet, les assujettis, qui sont autorisés à opérer globalement l’imputation de la taxe sur la valeur ajoutée, sont tenus de procéder à une régularisation : / a) Si les marchandises ont disparu ; / b) Lorsque l’opération n’est pas effectivement soumise à l’impôt ; / IV. La taxe déductible dont l’imputation n’a pu être opérée peut faire l’objet d’un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d’Etat. (…) ».

4. Aux termes de l’article 205 de l’annexe II au code général des impôts : « La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu’un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction. ». Aux termes de

l’article 206 de la même annexe : « I. – Le coefficient de déduction mentionné à l’article 205 est égal au produit des coefficients d’assujettissement, de taxation et d’admission. / II. – Le coefficient d’assujettissement d’un bien ou d’un service est égal à sa proportion d’utilisation pour la réalisation d’opérations imposables. Les opérations imposables s’entendent des opérations situées dans le champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des articles 256 et suivants du code général des impôts, qu’elles soient imposées ou légalement exonérées. / III. – 1. Le coefficient de taxation d’un bien ou d’un service est égal à l’unité lorsque les opérations imposables auxquelles il est utilisé ouvrent droit à déduction. / 2. Le coefficient de taxation d’un bien ou d’un service est nul lorsque les opérations auxquelles il est utilisé n’ouvrent pas droit à déduction. / 3. Lorsque le bien ou le service est utilisé



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concurremment pour la réalisation d’opérations imposables ouvrant droit à déduction et

d’opérations imposables n’ouvrant pas droit à déduction, le coefficient de taxation est calculé selon les modalités suivantes : / 1° Ce coefficient est égal au rapport entre : / a. Au numérateur, le montant total annuel du chiffre d’affaires afférent aux opérations ouvrant droit à déduction, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; / b. Et, au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d’affaires afférent aux opérations imposables, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations. / Les sommes mentionnées aux deux termes de ce rapport s’entendent tous frais et taxes compris, à l’exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée ; / 2° Lorsqu’un assujetti a constitué des secteurs distincts d’activité en application de l’article 209, le chiffre d’affaires à retenir pour le calcul du rapport mentionné au

1° est celui du ou des secteurs pour lesquels le bien ou le service est utilisé ; / 3° Pour

l’application des dispositions du 1°, il est fait abstraction du montant du chiffre d’affaires afférent : / a. Aux cessions des biens d’investissements corporels ou incorporels ; / b. Au produit des opérations immobilières et financières accessoires exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée. (…) / IV. – 1. Le coefficient d’admission d’un bien ou d’un service est égal à l’unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. / (…) 3. A l’exception des cas prévus au 1° bis du 4 de l’article 298 du code général des impôts, le coefficient d’admission est calculé en application des dispositions relatives à l’exclusion du droit à déduction fixées aux a, b et c du 1° du même 4 concernant, respectivement, les essences, les gazoles et le superéthanol E 85 et les gaz de pétrole et autres hydrocarbures présentés à l’état gazeux et le pétrole lampant. (…) / V. – 1. L’assujetti peut, par année civile, retenir : 1° Pour l’ensemble de ses biens et services utilisés concurremment à des opérations imposables et à des opérations non imposables, un coefficient

d’assujettissement unique, sous réserve d’en justifier ; 2° Pour l’ensemble de ses biens et services, un coefficient de taxation unique calculé dans les conditions du 3 du III. / 2. Les quatre coefficients mentionnés au I sont arrondis par excès à la deuxième décimale. Ils sont définitivement arrêtés avant le 25 avril de l’année suivante ou le 31 décembre de l’année suivante pour ceux qui deviennent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée en cours

d’année. ».

5. Aux termes de l’article 208 de cette même annexe : « I. – Le montant de la taxe déductible doit être mentionné sur les déclarations déposées pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, à condition qu’elle fasse l’objet d’une inscription distincte, la taxe dont la déduction a été omise sur cette déclaration peut figurer sur les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l’omission. Les régularisations prévues à l’article 207 doivent également être mentionnées distinctement sur ces déclarations. / II. – Lorsque, sur une déclaration, le montant de la taxe déductible excède le montant de la taxe due, l’excédent de taxe dont l’imputation ne peut être faite est reporté, jusqu’à épuisement, sur les déclarations suivantes. Toutefois, cet excédent peut faire l’objet de remboursements dans les conditions fixées par les articles 242-0 A à 242-0 K. ».

6. Par ailleurs, les paragraphes 30 et 40 de l’instruction BOI-TVA-DED-20-10-10 du

12 septembre 2012, relative à la détermination des droits à déduction de TVA, et plus précisément au coefficient d’assujettissement, prévoient que : « 30. Par dérogation au principe de l’affectation, les entreprises peuvent être autorisées par l’administration à déterminer leur droit à déduction pour l’ensemble de leurs dépenses (mixtes ou non mixtes) en appliquant la clef de répartition calculée en fonction de la quote-part des recettes taxables par rapport aux recettes totales. Autrement dit, l’ensemble des dépenses des entreprises qui appliqueraient cette dérogation serait réputé mixte. / 40. Cette autorisation, qui peut être sollicitée par simple demande sur papier libre auprès de la direction départementale des finances publiques dont



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relève l’entreprise, s’applique pendant une année civile entière. Elle est renouvelée par tacite reconduction sauf dénonciation par le contribuable ou par l’administration avant le

31 décembre de l’année considérée. / La clef de répartition doit être adaptée à la situation de

l’entreprise ce qui signifie que l’autorisation sera refusée dans les situations où la demande du redevable compromet les intérêts du Trésor. / Cette autorisation ne peut pas faire échec ni à la constitution de secteurs distincts car celle-ci est de droit lorsque l’entreprise exerce plusieurs activités soumises à des dispositions différentes en matière de TVA. ».

7. Un document de portée générale, émanant d’une autorité publique et susceptible

d’avoir des effets notables sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de le mettre en œuvre, ne peut légalement ni fixer une règle nouvelle entachée

d’incompétence, ni comporter une interprétation du droit positif qui en méconnaît le sens et la portée, ni être pris en vue de la mise en œuvre d’une règle contraire à une norme juridique supérieure.

8. Sur la demande présentée le 2 mars 2011 par le centre hospitalier de Dax,

l’administration fiscale, par un courrier du 21 avril 2011, a validé, par dérogation aux dispositions de l’article 271 du code général des impôts et des II et III de l’article 206 de

l’annexe II à ce code, le principe et le taux d’une « clé de répartition économique » applicable à

l’ensemble des dépenses mixtes et non mixtes du centre hospitalier, égale au rapport, au numérateur, du montant des recettes afférentes aux opérations ouvrant droit à déduction, et au dénominateur, du montant total des recettes afférentes aux opérations dans le champ et hors du champ d’application de la TVA, y compris les subventions et les dotations publiques.

Cette autorisation, fondée sur l’instruction BOI-TVA-DED-20-10-10 du 12 septembre 2012, a été reconduite tacitement, l’établissement public ayant, chaque année, fait connaître au service le nouveau taux à retenir. Souhaitant abandonner le régime dérogatoire de la clé de répartition économique, qu’il estimait moins favorable que le régime de droit commun, le centre hospitalier de Dax soutient avoir rectifié ses modalités de calculs à compter de l’année 2014. Il a cependant continué de communiquer au service le taux de sa clé de répartition, au titre de l’année 2014, par un courrier du 23 avril 2014, et au titre de l’année 2015, par un courrier du 7 avril 2015, sans informer le service de son changement d’option, ni des nouveaux calculs servant de base à la détermination de son droit à déduction. Il a, par ailleurs, inscrit sur une ligne distincte de sa déclaration CA3 du mois de novembre 2016 un montant de TVA déductible de 1 041 397 euros, précédemment omis au titre de la période 2014-2015.

9. Par la décision contestée du 27 avril 2018, prise sur la demande de restitution de crédit de TVA présentée par l’établissement public, l’administration fiscale a opposé au centre hospitalier de Dax que le complément de TVA déductible de 1 041 397 euros porté sur sa déclaration du mois de novembre 2016 était intervenu hors délais, au motif qu’il n’avait pas renoncé à l’option antérieure avant le 31 décembre 2014, s’agissant de l’année 2014, et avant le

31 décembre 2015, s’agissant de l’année 2015. Ce faisant, le service doit être regardé comme

s’étant fondé sur le paragraphe 40 précité de l’instruction BOI-TVA-DED-20-10-10 du

12 septembre 2012. Cette instruction administrative, relative au seul coefficient

d’assujettissement, ajoute aux dispositions précitées de l’article 271 du code général des impôts et de l’article 206 de l’annexe II à ce code, un régime simplifié dérogatoire basé sur une unique clé de répartition appliquée à l’ensemble des dépenses de l’entreprise, alors réputé mixte, et soumet l’assujetti à l’obligation de renoncer à l’option choisie antérieurement, au plus tard au

31 décembre de l’année considérée.



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10. Or, les dispositions du 1 du V de l’article 206 de l’annexe II au code général des impôts, dans leur rédaction applicable au présent litige, distinguent, d’une part, un coefficient

d’assujettissement unique, que l’assujetti peut retenir pour l’ensemble de ses biens et services utilisés concurremment à des opérations imposables et à des opérations non imposables, sous réserve d’en justifier, d’autre part, un coefficient de taxation unique, que l’assujetti peut retenir pour l’ensemble de ses biens et services, qui doit être calculé dans les conditions visées au 3 du III de l’article 206. Les dispositions du 2 du V du même article précisent en outre que les quatre coefficients mentionnés au I, à savoir les coefficients d’assujettissement, de taxation et

d’admission, et le coefficient de déduction, qui est égal au produit de ces trois coefficients, doivent être définitivement arrêtés avant le 25 avril de l’année suivante, pour ceux qui, comme le centre hospitalier de Dax, étaient antérieurement redevables de la taxe sur la valeur ajoutée.

11. Par suite, le centre hospitalier de Dax est fondé à soutenir que l’administration fiscale ne pouvait lui opposer le fait de ne pas avoir renoncé, avant le 31 décembre de chaque année considérée, à l’option antérieure prévue par l’instruction précitée, pour lui refuser le bénéfice des dispositions du code général des impôts dont il sollicitait la mise en œuvre, par l’inscription supplémentaire sur sa déclaration du mois de novembre 2016, au demeurant déposée le délai prescrit par l’article 208 précité de l’annexe II à ce code.

12. Toutefois, l’administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l’impôt que le rehaussement d’imposition dont la décharge est demandée est légalement fondé sur un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date du fait générateur de l’impôt. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l’auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement les rectifications en litige, puis d’apprécier s’il résulte de l’instruction que l’administration aurait notifié les mêmes rectifications si elle s’était fondée initialement sur ce motif. Dans l’affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu’elle ne prive pas le requérant d’une garantie procédurale liée au motif substitué.

13. En l’espèce, le directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-

Atlantiques fait valoir, à titre de substitution de motifs, que la méthode retenue par le centre hospitalier méconnaît les dispositions des articles 206 et 209 de l’annexe II au code général des impôts, et que l’établissement public ne justifie pas de la détermination des différents coefficients de déduction dont il entend faire application. Le centre hospitalier de Dax, à qui le mémoire en défense du directeur départemental des finances publiques a été régulièrement communiqué, n’a été privé d’aucune garantie, eu égard à la procédure qui a été suivie devant

l’administration fiscale, par application de l’article L. 198 A du livre des procédures fiscales, et dès lors que le remboursement d’un crédit de taxe sur la valeur ajoutée n’est pas au nombre des questions sur lesquelles, en cas de désaccord, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires peut être saisie, sur le fondement de l’article L. 59 A du même livre.

14. Aux termes de l’article 209 de l’annexe II au code général des impôts : « I. – Les opérations situées hors du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée et les opérations imposables doivent être comptabilisées dans des comptes distincts pour l’application du droit à déduction. / Il en va de même pour les secteurs d’activité qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la taxe sur la valeur ajoutée. / Sont constitués en secteurs

d’activité : / 1° Chaque immeuble ou ensemble d’immeubles ou fraction d’immeuble dont la livraison à soi-même est imposable en application du II de l’article 278 sexies du code général



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des impôts ou dans lequel sont réalisés des travaux d’amélioration, de transformation ou

d’aménagement de logement dont les livraisons à soi-même sont imposables en application du

1° du 3 du I de l’article 257 du même code ; / 2° Les immeubles, ensembles d’immeubles ou fractions d’immeubles dont la location est imposée en application du 2° de l’article 260 du code général des impôts ; / 3° Les services mentionnés à l’article 260 A du code général des impôts ; /

4° Pour les organismes agissant sans but lucratif désignés au a du 1° du 7 de l’article 261 du code général des impôts : /a. L’ensemble de leurs opérations qui ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et des ventes qu’ils consentent à leurs membres au-delà de 10 % de leurs recettes totales ; / b. chacune des manifestations de bienfaisance ou de soutien qu’ils organisent et dont les recettes sont imposables à la taxe sur la valeur ajoutée ; / 5° Chaque opération de lotissement ou d’aménagement de zone réalisée par les collectivités territoriales ou leurs groupements. / II. – Les biens d’investissement ouvrant droit à déduction sont inscrits dans la comptabilité de l’entreprise pour leur prix d’achat ou de revient diminué de la déduction à laquelle ils donnent droit, rectifié, le cas échéant, conformément aux dispositions de

l’article 207. ».

15. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées du premier alinéa du I de

l’article 209 de l’annexe II au code général des impôts qu’il appartient à l’assujetti, pour

l’application du droit à déduction, de comptabiliser dans des comptes distincts les opérations situées hors du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée et les opérations imposables. Ainsi que le soutient l’administration fiscale, le centre hospitalier de Dax, qui affirme s’appuyer sur sa comptabilité analytique pour déterminer les coefficients d’assujettissement propres à chaque dépense, n’établit pas s’être conformé à une telle obligation.

16. En deuxième lieu, le centre hospitalier de Dax soutient avoir entendu abandonner, à compter de l’année 2014, le régime simplifié dérogatoire qu’il était autorisé à appliquer depuis l’année 2011. Il résulte de l’instruction que l’établissement public a distingué les activités de service public de soins et d’hospitalisation, qu’il exerce à titre principal, dont il est constant qu’elles se situent hors champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée, les activités de formation, qui entrent dans le champ d’application de la TVA mais en sont exonérées, et les activités de pharmacie, de restauration et de blanchisserie, qui au regard de cette taxe sont de type mixte. Les médicaments, qui font l’objet d’achats globaux, sont, en effet, pour partie consommés pour les patients hospitalisés, et pour partie rétrocédés auprès de tiers.

Les prestations de repas sont assurées, d’une part, au profit des patients de l’hôpital, d’autre part,

à destination des personnels de l’établissement et des tiers. Les infrastructures de la blanchisserie sont employées, d’une part, pour le lavage des draps des patients hospitalisés et les blouses des médecins et infirmiers de l’établissement, d’autre part, pour des prestations semblables facturées à d’autres établissements de santé. Par ailleurs, le centre hospitalier de Dax a répertorié des frais généraux communs à des opérations imposables et non imposables, et notamment certaines dépenses de fonctionnement et d’investissement concernant des services ou pôles dont les locaux et le matériel sont mis à la disposition de médecins exerçant à titre libéral, contre paiement d’une redevance, et dont la proportion d’utilisation est connue à réception du décompte final des actes médicaux réalisés par ces médecins.

17. Ainsi, les activités de pharmacie, de restauration et de blanchisserie, ainsi que les frais généraux communs tels que les dépenses liées à l’activité des médecins exerçant en libéral dans les locaux de l’hôpital, ouvrent droit à déduction, en application du II de l’article 206 de

l’annexe II au code général des impôts, à concurrence du coefficient d’assujettissement des biens et services correspondants, qui est égal à la proportion de leur utilisation pour la réalisation



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d’opérations imposables. Il appartenait donc au centre hospitalier, qui se prévaut, non de la possibilité de retenir un coefficient d’assujettissement unique, prévue au 1° du 1 du V de l’article 206, mais de l’application des dispositions du II du même article, de calculer le coefficient d’assujettissement de chaque bien et service, en fonction de sa proportion d’utilisation pour des opérations imposables. Il lui était loisible, pour ce faire, de s’appuyer sur le niveau le plus détaillé de sa comptabilité analytique. Or, il résulte de l’instruction que, pour ses frais généraux communs aux opérations imposables et non imposables, le centre hospitalier n’a pas appliqué un tel calcul, mais il a retenu un ratio comprenant au numérateur les recettes dans le champ d’application de la TVA, imposables et exonérées, et au dénominateur les recettes totales, hors champ et dans le champ. S’agissant des pôles d’activité de pharmacie, de restauration et de blanchisserie, le requérant ne justifie pas de ce qu’il aurait fait une correcte application des dispositions du II de l’article 206, ni d’ailleurs du principe énoncé au point 15. Toutefois, à supposer même qu’il aurait déterminé, par pôle d’activité, le coefficient d’assujettissement global se dégageant, à titre indicatif, de calculs conformes aux dispositions précitées, le centre hospitalier ne peut être regardé comme ayant entendu ériger les activités de pharmacie, de restauration et de blanchisserie, et les frais généraux communs à l’ensemble des activités de l’établissement, en un ou plusieurs secteurs d’activité distincts, au sens des dispositions du deuxième alinéa et des 1° à 5° du I de l’article 209 de la même annexe, dont ils ne relèvent effectivement pas.

18. En conséquence, le motif opposé par l’administration fiscale tiré de ce que seul le coefficient de taxation est susceptible d’être affecté par la constitution de secteurs d’activités, est sans incidence sur les rectifications en litige.

19. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 16 et 17, et alors même que le requérant ne justifie pas des modalités de calcul qu’il soutient avoir appliquées, le centre hospitalier de Dax ne peut être regardé comme ayant entendu appliquer, pour chacun des pôles d’activité de pharmacie, de restauration et de blanchisserie, un coefficient d’assujettissement unique, au sens du 1° du 1 du V de l’article 206 de l’annexe II au code général des impôts. Le motif opposé par l’administration fiscale tiré de ce que les modalités d’établissement d’un tel coefficient unique auraient été méconnues, pour les dépenses de ces trois pôles d’activité, doit donc être écarté.

20. En revanche et en quatrième lieu, le centre hospitalier soutient que ses frais généraux comportent des dépenses communes aux activités exonérées et aux activités mixtes, pour lesquelles il détermine un coefficient de déduction adapté à l’ensemble des opérations réalisées. Il précise que le « coefficient de déduction forfaitaire » ainsi appliqué aux frais généraux communs est le produit de trois coefficients, à savoir le coefficient d’assujettissement, calculé sur la base d’un ratio comprenant au numérateur les recettes dans le champ d’application de la TVA, imposables et exonérées, et au dénominateur les recettes totales, hors champ et dans le champ, le coefficient de taxation, calculé sur la base d’un ratio comprenant au numérateur les recettes imposables et au dénominateur les recettes dans le champ, imposables et exonérées, et un coefficient d’admission, fixé par défaut à l’unité. Ce faisant, toutefois, le centre hospitalier de Dax a retenu un coefficient d’assujettissement unique pour l’ensemble de ses biens et services utilisés concurremment à des opérations imposables et à des opérations non imposables. Il doit donc être regardé comme ayant fait application des dispositions précitées du 1° du 1 du V de l’article 206 de l’annexe II au code général des impôts. Or, le requérant a appliqué le même ratio que l’ancienne clé de répartition économique, en incluant donc, à tort, dans son calcul, les opérations situées hors du champ d’application de la TVA. En outre, et à supposer même qu’un



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coefficient de taxation unique puisse être admis, non pour l’ensemble des biens et services de l’assujetti, mais pour ses seuls frais généraux communs, les dispositions de l’article 206 ne prévoient pas la possibilité de retenir, pour l’ensemble des biens et services utilisés concurremment à des opérations imposables et à des opérations non imposables, un « coefficient de déduction forfaitaire ». En conséquence, le directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques est fondé à soutenir que la méthode hybride retenue par le centre hospitalier de Dax est contraire aux dispositions de l’article 206 de l’annexe II au code général des impôts.

21. En cinquième lieu, ainsi que le soutient l’administration en défense, le centre hospitalier de Dax, en tout état de cause, n’apporte aucun élément de nature à justifier la détermination des coefficients dont il se prévaut, au titre des années en litige. En particulier, s’il affirme que ses calculs sont, au surplus, conformes aux dispositions du 2 du IV de l’article 207 de l’annexe II au code général des impôts, en vertu desquelles, « Lorsqu’un bien en stock, ou un bien immobilisé non encore utilisé, vient à être utilisé à des opérations ouvrant droit à déduction, la taxe initiale peut être déduite à proportion du coefficient de déduction résultant de ce changement », il n’en justifie pas par les seuls tableaux produits à l’appui de ses écritures, qui se bornent à présenter la méthode employée sans justifier les coefficients retenus. Au surplus, il ne résulte pas de l’instruction que lesdits coefficients, retenus pour les dépenses mixtes des années 2014 et 2015 aient été définitivement arrêtés, respectivement le 25 avril 2015 et le 25 avril 2016, par application des principes énoncés au point 10, le centre hospitalier ayant transmis à l’administration fiscale sa clé de répartition économique, dans la poursuite de la pratique antérieure.

22. Il résulte de tout ce qui précède que les motifs invoqués, par voie de substitution, par le directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques, tirés de la méconnaissance des articles 206 et 209 de l’annexe II au code général des impôts, et de l’absence de justification de la détermination des différents coefficients de déduction dont le centre hospitalier de Dax entend faire application, sont de nature à fonder légalement les rectifications en litige. L’administration aurait, en conséquence, notifié les mêmes rectifications si elle s’était fondée initialement sur ces motifs. Il s’ensuit qu’il y a lieu d’accueillir la substitution de motifs demandée, dont il a été exposé au point 13 qu’elle ne prive pas le requérant d’une garantie procédurale liée aux motifs substitués.

23. Par suite, les conclusions de la requête du centre hospitalier de Dax, tendant à la restitution d’un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 460 138 euros, au titre du mois d’août 2017, et à ce que les dégrèvements correspondants soient assortis d’intérêts moratoires, doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Dax est rejetée.



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Article 2 : Le présent jugement sera notifié au centre hospitalier de Dax et au directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l’audience du 17 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Cabon, premier conseiller faisant fonction de président, M. Bourda, premier conseiller, M. X, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2020.

Le rapporteur, Le président,

Signé Signé

V. X P. CABON

La greffière,

Signé

P. SANTERRE

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme : La greffière,

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Tribunal administratif de Pau, 30 décembre 2020, n° 1801459